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Problèmes de socialisation des enfants Tourette

Comment gérer les problèmes de socialisation dans le SGT
Introduction

Le SGT est de mieux en mieux connu, certes, mais le traitement autre que pharmacologique reste toujours un grand défi pour endiguer les problèmes de comportement; les intervenants médicaux et, scolaires de même que les parents se sentent démunis devant certains enfants qui semblent avoir une facilité exceptionnelle hors du commun, pour nous déjouer. Alors même qu’on devrait être « expert » en la matière après bon nombre d’années de travail auprès de ces jeunes, il nous arrive encore de perdre pied, d’être complètement dérouté, dépassé, sans imagination pour arriver à dénouer la situation qui périclite. Alors il faut retrousser les manches une nième fois et chercher encore la stratégie qui va peut être cette fois être la bonne.

Ceux d’entre vous qui lisez cette chronique pour la première fois parce que vous venez d’apprendre le diagnostic de votre enfant ne vous laissez pas abattre par cette petite introduction d’apparence pessimiste; dites-vous que si je m’intéresse autant à ces enfants parfois difficiles, c’est aussi parce qu’ils sont tellement attachants mais surtout, parce qu’ayant vu mes premiers patients évoluer, devenir des adultes, je sais maintenant que plusieurs d’entre eux peuvent faire de grandes choses, réaliser de beaux projets et être responsables au sein de leur communauté. Alors il ne faut pas baisser les bras, il faut continuer de les outiller en attendant que la maturation fasse son œuvre, quelquefois devons-nous l’avouer, assez tardivement.

J’aborderai aujourd’hui quelques suggestions qui peuvent être utiles dans notre intervention auprès des enfants qui présentent des problèmes de socialisation.

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Diminuer le temps d'interaction sociale

La socialisation, oui, mais à petites doses. C’est surtout quand il a une faible tolérance à la frustration et une tendance à l’impulsivité que l’enfant qui présente un SGT a de la difficulté à accepter les règles de vie en société (attendre son tour, respecter le tour de parole, tenir compte de l’autre, développer une capacité d’empathie…). Il aura alors du mal à s’organiser avec les pairs surtout quand il se retrouve en grand groupe ou durant des périodes moins encadrées (les récréations, le dîner, les activités non structurées). Il peut être quelquefois souhaitable voire indispensable de diminuer l’interaction avec les pairs en offrant au jeune une alternative alléchante pour lui durant ces périodes de battement entre les cours. On peut par exemple, donner une petite responsabilité journalière supervisée par le concierge de l’école, le professeur d’éducation physique, la secrétaire, l’infirmière, le directeur d’école…qui aura l’avantage de valoriser l’enfant tout en évitant de le voir se désorganiser sur la cours de récréation. On peut aussi proposer une activité ludique mais en individuel, et pourquoi pas les jeux sur ordinateur qui les attirent tant, ou encore l’internet avec la possibilité de « chatter » avec d’autres jeunes atteints du SGT constituant ainsi une forme de socialisation à moindre risque pour la désorganisation.

À l’heure du dîner pourquoi ne pas trouver une famille dans le voisinage de l’école pour offrir à l’enfant une ambiance certainement plus paisible que le brouhaha d’une cafétéria d’école. Il ne s’agit pas d’imposer de telles contraintes à l’enfant ou au jeune car s’il n’en ressent pas le bénéfice, cette intervention loin d’être thérapeutique peut envenimer la problème. Par contre, si au contraire on arrive à le convaincre du bénéfice qu’il peut en tirer, on lui donne la chance de profiter d’un oasis dont il a besoin pour se calmer.

À petites doses, les moments de socialisation peuvent avoir un impact plus positif qui permet au jeune de se reconstruire une image de soi quelquefois bien amochée par les échecs répétitifs. Ce n’est donc pas la quantité mais la qualité des interactions sociales qui favorisent la socialisation. Plus vieux, quand les règles de vie en société auront été mieux intégrées ils sera encore temps d’en profiter. D’ailleurs, une fois adultes, plusieurs d’entre eux démontrent une excellente capacité d’interaction sociale.

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Focaliser sur la tâche

Un enfant qui a un SGT est souvent un enfant curieux qui aime se mêler de tout ce qui se passe autour de lui, y compris de ce qui ne le concerne pas. Et c’est là souvent que débute le drame, parce qu’il en profitera pour agacer l’autre, pour provoquer, pour faire rire parfois ou pour attirer l’attention en classe pour semer la « bisbille » avec son frère ou sa soeur. Comme il ne comprend pas qu’il dérange tout le monde, il se fait remettre à sa place et se trouve injustement réprimé. En un rien de temps il crie à l’injustice, il se met en colère et désorganise toute la famille ou même toute une classe. Pour éviter l’escalade, par une série d’avertissement de plus en plus menaçants, il vaut toujours mieux recentrer l’enfant sur sa tâche.

Enseigner formellement et explicitement les règles de vie en groupe

La plupart des enfants apprennent spontanément un grand nombre de règles sociales implicites sans que celle-ci ne leur soient présentées. Ils les découvrent au fil de leur expérience dans leur relation avec les autres. Ils apprennent graduellement ce qui se fait et ce qui ne se fait pas.

L’enfant qui a un SGT peut souvent être inadéquat parce qu’il n’a pas intégré les règles qui régissent les interactions sociales. Il faut alors les lui montrer de manière explicite. On peut constituer avec l’enfant un cahier de règles sociales qu’on l’invitera à illustrer, et qu’on gardera précieusement à l’abri pour éviter de le chercher au fond d’un tiroir en fouilli. Chaque fois qu’un comportement asocial se produit ou chaque fois qu’une règle déjà illustrée est enfreinte, on reprend le cahier, on revoit avec lui la règle et on en ajoute au besoin. C’est beaucoup d’énergie, mais ça rapporte gros et ça donne une chance d’aborder le problème positivement. On peut ainsi réviser et raffiner de plus en plus le cahier des règles qui deviendra un outil précieux d’intervention.

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Privilégier les activités « solos »

Si l’enfant présente aussi une hyperactivité, on sera tenté de lui faire passer son trop plein d’énergie dans des sports généralement exigeant sur le plan physique. Par contre, un sport d’ééquipe exige aussi l’intégration simultanée de plusieurs règles et sollicite tellement la tolérance d’autrui (accepter les erreurs des partenaires et les bons coups des adversaires) qu’il peut devenir fertil pour la désorganisation de l’enfant. Si le sport d’équipe amène plus de désagréments que les bénéfices qu’il est censé apporter, il vaut peut-être mieux viser des sports ou activités individuels qui, secondairement, pourra favoriser le développement de l’estime de soi. On pourra en effet identifier un sport ou une activité dans laquelle l’enfant pourra éventuellement exceller. Afin d’éviter que l’enfant ne démissionne trop rapidement, on tentera de tout mettre en œuvre pour investir cette activité; comme parents, on assistera aux expositions ou compétitions qui y sont reliées; on impliquera les autres membres de la fratrie et de la famille élargie comme spectateurs lors des exhibitions. On développera chez l’enfant les attitudes saines de la compétitions, et on valorisera la participation.

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Par Francine Lussier, Ph. D. Neuropsychologue Directrice des activités cliniques et scientifiques au Centre de formation CENOP Inc. Professeure associée au Département de psychologie de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR)

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